ootd ϟ  Une tasse de café noir brûlante dans le creux des tes mains tu observes silencieusement la foule s’agiter derrière la vitrine du café où tu as décidé de t’arrêter. Il est environ dix-huit heures trente et certains chanceux ont trouvé en ce vendredi soir l’occasion de quitter le travail plus tôt. Ils et elles s’engouffrent dans le métro, les yeux rivés sur leur téléphone. Tu souris. Bientôt ces gens qui s’agitent regarderont peut-être faire la pluie et le beau temps sur leurs écrans. Parce que c’est officiel, tu fais partie de ceux et celles qui ont été sélectionnés pour participer à ce qui est déjà annoncé comme l’émission de l’année. Terrace House. Télé-réalité non scriptée. Des caméras H24 braquées sur toi. Idée déroutante et en même temps excitante. Il te tarde. Oui tu as hâte d’ouvrir ce nouveau chapitre de ta vie et tu jubiles à l’idée de le faire devant les yeux de ceux et celles à qui tu as décidé de ne plus donner accès à toi. Tu as hâte. Tellement hâte de les faire devenir chèvre derrière leurs écrans. Tu les imagine déjà devenir rouge de colère, hurler sans pouvoir être entendu et tu souris davantage en savourant ton café les yeux toujours rivés sur les passants. Finalement il apparaît et ton sourire s’agrandit encore un peu plus. Vos regards se croisent et tu lui fais signe de la main avant de le tacler gentiment sans même qu’il est le temps de s’asseoir. « Je vois que tu ne changes pas tes habitudes, t’aimes toujours te faire désirer. Faire attendre une belle femme comme moi t’as pas honte ? » dis-tu avant d’ajouter dans la foulée. «  Tu m’as manqué ». C’est là le genre de phrase qu’il est bien l’un des seuls à pouvoir attendre. Il fait partie de cette infinité de chanceux à qui tu n’as pas peur de montrer de l’affection. L’un des seuls qui sait que dans le fond tu n’es pas qu’un cœur de pierre. « Tu veux boire quelque chose ? » tu souris « évidemment c’est toi qui invites parce qu’en 2020 tu te dois de devenir un gentleman ».

ootd ϟ  Il préfère en général quand il voit les gens qui comptent réellement pour lui dans des endroits privés. Chez lui, ou chez eux. À des endroits où ils ne risquent pas de se faire repérer par des journalistes ou autres paparazzis. Ou même juste des mauvaises langues ou des quinquagénaire avec la maladie de la concierge. Mais Genesis lui a demandé de la rejoindre dans un café, et c'est bien connu entre eux qu'il y a pas grand chose qu'il peut lui refuser. Alors il s'est préparé pour s'y rendre. Un beau style de mec coincé, et même une petite paire de lunettes qu'il ne sort qu'en d'assez rares occasions. Aujourd'hui, ça va bien avec le reste, alors pourquoi pas. Lui qui met toujours un point d'honneur à être à l'heure ne prend pas la peine de se dépêcher cette fois ci. Parce que personne, à part Gen, ne saura qu'il est en retard. Et finalement, ça lui prend assez longtemps de se coiffer comme l'intello qu'il n'est pas. Ou pas trop. En tout cas moins que ce que l'on peut imaginer. Entre le moment où il sort de sa maison et le moment où il arrive au café, il a vu deux mecs avec des appareils photos braqués sur lui et plusieurs gamines le prendre avec leur portable. Lui, ça le dérange pas, il est habitué depuis sa naissance. Mais il se demande quand même qui leur a donné leur éducation. Parce qu'il y aurait clairement des choses à y redire.
Il entre dans le café finalement et remarque bien vite son amie assise à une table. Amie. C'est un mot qu'il utilise souvent, ça. Mais là, il le pense,  sincèrement. Et c'est ce qui rend la chose aussi rare. Et aussi précieuse. Il lui sourit quand il la voit. Un sourire entre celui qu'il offre à ceux qui les observe et un plus mutin dirigé seulement pour Gen. Il entend sa pique mais l'ignore. Il est le seul à avoir entendu sa remarque, et c'est tant mieux. Il lui a manqué, qu'elle dit. Il répond un "moi aussi" rapide, presque inaudible. C'est la stricte vérité. Rares sont ces personnes avec qui il se permet d'être lui-même. Et Gen en fait partie. Elle lui propose de boire un truc, lui dit que c'est à lui de payer, et Jun, il garde juste cette même tête, souriante, pour les caméras. Il aime vraiment pas avoir à jouer la comédie alors que Gen est là, face à lui. "Enfin Gen. J'ai toujours été un gentleman". Il se lève et va au comptoir. Il y commande un chocolat chaud et paye directement pour sa consommation et celle de Genesis.
Il retourne à la table, son chocolat en préparation, et il continue de sourire. Il lance pas la conversation. Et elle sait qu'il va pas la lancer. Ils n'auraient été que tous les deux, il aurait pas même prononcé un seul mot depuis qu'ils se sont retrouvés. Mais ils sont pas seuls, et il doit garder les apparences, alors il répond quand il le doit. Mais il parlera pas, à part s'il est absolument obligé de le faire. Il continue juste à sourire à Gen. Mais elle comme lui ils savent. Le sourire est pour les caméras potentielles et les ragots. Pas pour elle.
Il sait déjà que ça va faire parler, et probablement que ça va amener quelques rumeurs. Mais jamais aucune n'a été tenace. Heureusement.
Manquerait plus que les gens pensent qu'il est en couple et qu'il va se marier ou des conneries dans le genre.

ootd ϟ  À peine est-il assis que tu réalises que quelque chose n’est pas tout à fait comme d’habitude. Tu observes les lunettes qu’il a sur le bout du nez et le pull aux couleurs pastel qu’il a décidé de mettre sur son dos. Non pas que ce ne soit pas à ton goût. Jun pourrait porter un sac poubelle, il aurait toujours du style c’est simplement que c’est assez inhabituel et que l’image toute lisse du premier de la classe n’est pas vraiment celle à laquelle il t’a habituée. « C’est nouveau ça » lâche tu en pointant du doigt ses cheveux plaqués parfaitement. « Si je peux me permettre ce n’est pas vraiment ton meilleur look, mais tu dois déjà le savoir ». Tu lis en lui comme dans un livre ouvert, tu sais bien qu’il a aujourd’hui décidé d’endosser le rôle du parfait petit coréen pour que son image de petit ange reste intacte. Ça te fait grimacer. Dieu comme tu aimerais que lui aussi puisse un jour arrêter de se soucier de ça. Voler de ses propres ailes sans plus ne jamais avoir à se soucier de ce que les autres peuvent bien penser de lui. Seulement les choses ne sont pas si simples. Lui à des attaches que tu n’as plus et tous les comptes à rendre qui vont avec. S’ajoutent à cela les caméras braquées sur lui, des caméras que parfois tu détestes tant tu as l’impression qu’elles l’empêchent d’être celui qu’il aimerait être. Il te dit que toi aussi tu lui as manqué et ça t’arrache un sourire. Tu sais à quel point ce genre de mot son précieux avec une personne comme lui. Presque tout autant qu’ils sont rares dans ta bouche. Puis soudain tu réalises, tu réalises que ce café. Cet endroit qui paraît pourtant être des plus lambda et pour lui le royaume du jeu. Il endosse un rôle parmi tant d’autres. Aujourd’hui celui du gentleman demain une autre étiquette viendra se coller sur le haut de sa tête. Tu l’observes au guichet et tu te mets soudainement à te demander ce qui t’a pris de lui demander de te rejoindre ici. Dans cet endroit où tout le monde peut le reconnaître. Ou les yeux des gens semblent être rivés comme les tiens sur sa silhouette. À peine est-il revenu que tu te sens presque obligée de lâcher un « j’suis désolée, j’sais pas ce qui m’a pris de te dire de me rejoindre ici, j’suis vraiment la pire ».

ootd ϟ  Il comprend vite qu'elle a juste oublié. Il lui en veut pas. Il est bien le seul timbré à aimer vivre à ce point dans le mensonge. Et c'est bien ça le truc. Il aime ça. Il aime tromper son monde. Il aime leur faire croire à des choses qui ne sont pas réelles. Il en veut pas à Genesis d'avoir oublié que le voir dans un café, ça incluait de pas le voir lui, Jun, mais Nim Minjun l'héritier, l'Ange de la Corée.  Il le confirme quand elle lui fait une remarque sur sa coupe. Et le rire qu'il lui offre, oh qu'il est faux. Le rire d'un jeune garçon gêné parce qu'une jolie fille lui a fait un reproche sur son look. Ce serait quelqu'un d'autre, Jun se serait foutu de sa gueule.  Mais dans ses yeux, dans son regard, face à Gen, il lui lance des "je sais" et des "yeurk". Elle a pris l'habitude de le voir chez lui, ou chez elle. La tête dans le cul et les cheveux en batailles. Elle a l'habitude de le voir comme personne ne l'a jamais vu. Alors forcément, le voir comme tout le monde le voir à travers les photos dans la magazines, ça doit lui faire bizarre, à Gen. Sa faute. Elle a choisi le lieu du rendez-vous. Il continue de sourire après son rire à deux balles. Son chocolat à la main quand il revient, il comprend qu'elle a compris. Et il baisse légèrement les yeux lorsqu'elle parle. C'est pas grave. Il lâche sa tasse de chocolat posée sur la table et relève les yeux vers elle alors qu'il tape deux fois sur la table avec son majeur de la main droite. Leur manière à eux de dire "c'est pas grave" ou "c'est ok". Il continue de sourire, mais son regard est doux. Ce langage c'est eux. C'est leur lien. C'est quelque chose qui les connecte et Jun sent une sorte de calme olympien lorsqu'il l'utilise. Comme s'il était dans son élément. Il reprend son chocolat et le porte à ses lèvres avant de le reposer sur la table. "Alors, comme tu vas ? Qu'est-ce que t'as à me raconter ?" Parce que ça, il peut le dire si des gens écoutent. Parce que ça, personne peut le reformuler pour en faire quelque chose sur lequel casser sa réputation.
Puis surtout, ça l'intéresse réellement. Comme elle va. Son amie de toujours.
La plus vieille amie qu'il ait.
Une des seules.

ootd ϟ  Vraiment la pire voilà ce que tu es. On pourrait presque te décerner aujourd’hui l’oscar de la pire pote du siècle. Bon t’abuses peut-être un peu voir même beaucoup, mais tu te sens soudainement vraiment mal à l’idée d’avoir pu oublier quelque chose d’aussi important. Ce n’est pourtant pas comme si tu l’avais rencontré la semaine dernière. Au contraire, les années t’ont permis de comprendre à quel point le monde extérieur change la donne pour Jun. Enfin, finalement le sais-tu vraiment ? A y regarder de plus prêt tu ne te souviens pas d’à quand remonte la dernière fois que vous vous êtes vu dans un lieu public en dehors des grandes sauteries organisées par vos familles respectives. C’est peut-être même une fois les choses posées la première fois que vous vous retrouvez dans un café et c’est aussi la première fois depuis longtemps que tu le vois jouer un rôle. Un rôle qui demande quelques ajustements et une certaine dose d’adaptation. Tu oublies presque la culpabilité alors qu’à l’aide de  son majeur il se met à taper deux fois sur la table. Madeleine de Proust. Tu serais presque frappée par la nostalgie à travers ce simple geste. Tu vous revois adolescents rebelles essayant d’échapper à ce qui était alors un calvaire à travers votre langage à vous. Il te rassure en te disant dans votre langage secret que tout va bien. En réponse tu tapes à ton tour deux fois ton majeur puis tu viens poser ton pouce sur la table. Un : tu en es sûre silencieux qu’il sera le seul à pouvoir déchiffrer. Parce qu’après tout il est encore temps de mettre les voiles et de se retrouver dans un endroit plus privé ou faire semblant n’aura plus lieu d’être. Seulement et contre toute attente, il ne semble pas de cet avis. Il reprend le rôle qu’il a décidé de jouer aujourd’hui et finit par te demander comment tu vas et ce que tu as à lui raconter. Alors toi aussi tu décides de jouer et tu as même envie de le titiller un peu, parce qu’après tout qui aime bien châtie bien non ? Tu viens poser ta main sur la sienne et tu lances de ta voix la plus séduisante  «  Ça va toujours bien quand tu es là ». Tu finis par le libérer en jetant ton dévolu sur ta tasse de café dont tu bois une gorgée avant d’éclater de rire. Non tu ne sais pas jouer, en tout cas pas avec lui.  « Je te dirais tout ça après, mais toi alors comment vas-tu ? »

ootd ϟ  Leur truc à eux, cette façon de parler. Cette façon de communiquer, plutôt. Leur truc à eux, cette façon qu'ils ont, de taper des doigts sur la table, de dire des mots à la place d'autres. Parfois juste un clignement des yeux un peu plus long que ce qui ne serait demandé par le corps juste pour affirmer ou non quelque chose. Ils conversent comme ça depuis qu'ils se sont rencontrés, et avec les années, leur langage à eux n'a jamais cessé de s'améliorer. Ils n'ont jamais cessé de trouver de nouveaux moyens, de plus en plus précis, de plus en plus discret, pour se dire les choses. Et il cligne d'ailleurs une fois des yeux longuement lorsqu'elle lui demande si il est sûr que ça va. Et oui. Vraiment. Ça va. Il lui en veut pas. Pour lui, c'est juste différent. C'est juste pas la même chose, qu'ils se voient ici ou chez elle ou chez lui. C'est juste qu'il va pas agir de la même manière. Mais en soi, les émotions qu'il ressent, elles seront identiques. Celles qu'il ressent pour son amie en tout cas. Et Gen. Gen, elle le connaît. Elle sait lire dans ses yeux. Elle prend sa main dans la sienne et la sert. Ça le fait sourire, Jun, mais il fait comme s'il était légèrement gêné. Légèrement juste. Ce qu'elle lui dit, il sait que c'est du tease, mais il sait aussi qu'il y a probablement un fond de vérité. Après tout, il ressent plus ou moins la même chose. Quand elle est dans les parages, c'est rare qu'il aille mal. Il garde le sourire sur ses lèvres alors qu'il lui répond d'un ton bien trop enjoué pour ce que Gen est habituée à entendre de sa part. "Ça va, ça va. J'ai des nouvelles. Mais tu dois le savoir, je suppose. Pas comme si c'était possible de passer outre dans les magazines." Il l'a su par téléphone quelques minutes à peine avant de l'apprendre par un blog sur internet. Et depuis, tout le monde en a plus ou moins parlé. Genesis en a forcément entendu parler aussi.
Que Jun va participer à l'émission Terrace House version coréenne.

ootd ϟ  À première vue vous ne semblez pas avoir grand-chose en commun. Lui qui semble toujours faire attention à ne pas avoir un mot au-dessus de l’autre et toi qui hurles tes pensées sans te soucier d’autrui. Lui et son image de bon garçon, toi et la décadence que tu traînes derrière toi depuis quelques années. Lui et ses cheveux bien rangés toi et tes idées loufoques lorsque les astres sont alignés. Oui les gens assis dans ce café doivent se dire que quelque chose détonne. Tu peux presque les entendre chuchoter, mais qu’est-ce qu’il fait avec un tel énergumène. Ils ne savent pas. Non ils ne se doutent pas que vous êtes finalement bien plus semblable qu’il n’y paraît. Tu ne peux pas les blâmer après tout quand on s’arrête à la couverture du livre vous semblez si différent et pourtant lorsque l’on gratte un peu on se rend bien compte que vous êtes animé par le même désire : mener votre vie comme vous l’entendez. Lui en n’étant plus le gentil garçon parfait qu’on aimerait qu’il soit, toi en parvenant enfin à te détacher complètement d’un passé aliénant qui malgré toi et encore trop présent. Alors oui, finalement l’un comme l’autre vous voguez au grès du vent, au grès des personnes qui croisent votre route. Bien souvent, vous donnez le change, lui en donnant aux autres ce qu’ils ont envie de voir toi en feignant une bonne humeur sans faille.  Puis il y’a aussi ces moments, ou à travers un geste ou à l’aide d’un mot qui pourrait paraître anodin pour les autres, vous comprenez mieux que personne ce qui se passe en réalité. Il lit en toi comme dans un livre ouvert et toi tu déchiffres ses mots comme personne. Et tu chéris la chance que tu as de l’avoir un jour trouvé. Un sourire se dessine sur tes lèvres lorsqu’il te dit qu’il va bien et qu’il a des nouvelles.  « Évidemment je sais de quoi tu parles, faudrait vivre dans une grotte pour passer à côté ».  C’est affiché partout. T’as même reçu une notification sur ton portable c’est pour dire. Mais tu te fiches pas mal de ce que les tabloïds peuvent raconter, toi tu veux savoir ce qui l’a poussé à prendre cette décision.  «  Mais ce qui m’intéresse c’est ce qui t’a poussé à prendre cette décision ».  

ootd ϟ  Son père et sa mère étaient pas forcément d'accord avec le principe, mais ils ont fini par accepter en comprenant que, non, c'était pas de ces émissions débiles où y'avait un gagnant, une gagnante. Que non, leur fils parfait risquait pas de "perdre". Quoique, même si ça avait été une de ces émissions avec un gagnant et une multitude de perdants, Jun aurait très probablement gagné. Parce que Jun ne perd jamais. Sauf que le fait de perdre est un prérequis dans une situation bien particulière. Mais dans une émission comme ça ? Jamais. Il va se retrouver avec des jeunes, peut-être (probablement) riches, mais pas forcément aussi connus que lui. Et puis, certainement pas des gens que la population coréenne aiment autant que lui. Il jouit de cette fame de l'ange de Corée. Il n'est pas au même rang qu'une idole pourrait l'être, mais il en est pas loin. Les gens le connaissent, l'apprécient. Et dans une émission avec des votes du public comme c'est souvent le cas dans les émissions avec un gagnant, il aurait gagné. Sans hésitation. Et en toute sincérité, probablement sans difficulté non plus. Ses parents ont fini par accepter l'idée qu'il fasse l'émission. Puis c'est pas comme s'il leur avait vraiment laissé le choix. Et mieux encore, ils ont commencé à être content qu'il la fasse. Le père pensant que ça pourrait encore plus développer ses contacts pour plus tard. Sa mère pour que sa réputation soit encore meilleure une fois sorti de là, et que les gens se doutent encore moins de l'empire de drogue qui se trame sous chez les Nim.
Tout le monde est au courant. Et Gen aussi. Ce qui l'importe en réalité, c'est de savoir ce qu'elle en pense, Gen. Il veut savoir si elle va le juger, ou si elle va le supporter. Si elle est d'accord avec ça, ou contre. Parce que son avis compte. Elle est une des très rares personnes de qui l'avis a un intérêt pour Jun. Gen, et sa tante. Elles sont si rares qu'elles sont deux.
Elle veut savoir ce qui l'a poussé à prendre la décision. Et il réfléchit, Jun. Il réfléchit. À quelque chose qu'il peut répondre. Et qui peut faire "bien" face aux caméras. "C'était une opportunité pour développer mon réseau, pour plus tard. Quand j'aurai repris l'entreprise de papa." La façon dont il crache le mot papa est dédaigneux légèrement. Assez léger pour que les caméras et micros ne le décèlent pas. Mais largement assez visible pour que Gen le comprenne. Il agite ses doigts sur la table, tape son petit doigt une fois, puis le majeure gauche deux fois. Et comme s'il jouait du piano sur la table, une partition très précise, il lui dit tout autre chose complètement : Je veux voir jusqu'où je peux aller. Jusqu'où leur crédibilité va, à eux tous. Je veux voir jusque'à quel point ils peuvent continuer à me penser l'Ange de la Corée. Parce que tout ça, pour Jun, n'est qu'une énorme scène. Et lui, il est le plus grand prestidigitateur que la Corée ait connu.

ootd ϟ  Ce qui l’a poussé à accepter de participer à cette émission. C’est là une énigme que tu as l’intention de percer même si tu as déjà quelques hypothèses en tête. Les années aident et celle que tu as passée à côtoyer de près Jun ne laisse presque planer aucun doute. Oui, dans le fond vous avez sans doute l’un comme l’autre la même motivation première. Faire chier vos aïeux. Leur faire perdre la tête jusqu’à ce qu’ils n’osent même plus sortir de chez eux. Ou peut-être aussi leur faire réaliser que vous n’êtes pas que des pions, que vous avez votre mot à dire et vos choix à faire. Leur faire prendre conscience que vous êtes bien plus que ce qu’ils semblent voir ou avoir vu un jour. Toi, tu veux qu’ils se mordent les doigts, qu’ils prennent conscience de ce qu’ils n’auront plus jamais. Mais lui ? Lui tu n’en sais trop rien. Tu sais que parfois il les déteste, eux et la vie qu’ils lui ont transmis en héritage. Tu sais aussi pourtant que cette vie à du bon. Des avantages que l’un comme l’autre vous n’êtes pas tout à fait prêt à supprimer de vos vies. Et n’oublions pas, la famille aussi compliquée soit elle, reste la famille… Sans vraie surprise il te sort la phrase bateau qu’il sortira sans doute quand la caméra sera en train de le filmer. Toi ça t’arrache un sourire qui te ferait presque mourir de rire. Dire qu’un jour toi aussi tu as cru pouvoir te faire ta place au sein de l’entreprise de celui que tu pensais être ton père adoré. Mais tu fais bonne figure, parce que c’est ainsi que les choses doivent se passer en public.   « En effet c’est une très belle opportunité, je suis contente de te voir la saisir ». Si la première partie de ta phrase n’est qu’une succession de mot auxquels tu ne donnes pas vraiment de profondeur, la seconde partie elle se veut bien plus honnête. Oui tu es réellement heureuse pour lui. Heureuse qu’il se donne l’occasion de tester les choses par lui-même, sans plus vraiment donné de crédit à ce que ces très chers parents peuvent bien penser. Ses doigts s’agitent et ton sourire grandit. Bien jouer Jun.  « J’suis fière de toi », lui lâches-tu dans un élan de satisfaction.  « J’espère que tu seras toi aussi fière de moi », lances-tu avant de lui annoncer à ton tour la nouvelle qui te brûle les lèvres depuis qu’il te fait face.  « J’ai moi aussi décidé de participer à Terrace House » puis à ton tour tu te mets à taper du bout de tes doigts sur la table et on pourrait dire que nos motivations sont les mêmes.

ootd ϟ  Il lui arrive de se demander à Jun, s’il compte vraiment reprendre l’entreprise de son père un de ces jours. Et la réponse est toujours plus ou moins la même : on verra. Le business de sa mère ? On verra. Il ne prévoit rien, parce que même s’il est convaincu d’être assez doué pour garder la face pendant toutes ses années, il sait pas si dans dix ans, ce sera toujours aussi amusant, de voir à quel point les gens sont crédules, naïfs, et à quel point ils achètent ce que Jun leur balance par les médias. Il se dit que ça le lassera. Ça fait plusieurs années qu’il économise, et il se dit que si un jour il en a marre, il aura qu’à partir loin et jamais revenir. Ce sera jamais aussi simple que ça, mais c’est un beau rêve, un beau futur que de penser ça possible. Pour le moment, ceci dit, il s’amuse. Il s’amuse, et les seuls rares qui sont au courant le regardent faire avec admiration, compassion ou juste en tant que spectateurs aguerris. Puis y’a Genesis, qu’est une autre case entièrement. Qu’est juste là depuis le début, et qui l’a vu évoluer,  grandir  et devenir ce qu’il est devenu.  Jun le vrai,  silencieux, joueur, et qui observe le monde  et sa stupidité, et Minjun, le garçon riche et  beau, l’Ange de Corée,  le gentil le doux. Elle connaît les deux parfaitement, elle sait ce qui est vrai, ce qui est faux. Elle le comprend comme personne d’autre n’a jamais pu, ni su, le faire. Il sait qu’elle comprend son message lorsqu’il tapote la table à répétition. Et il écoute sa réponse avec attention. Elle lui dit que c’est une belle opportunité, qu’elle est heureuse de le voir la saisir. Et Jun sait que c’est pas juste pour les caméras ou les possibles oreilles indiscrètes. Elle pense ce qu’elle dit. Et elle répond autant pour eux que pour son message codé. Il regarde ses doigts qui s’agitent à son tour. Elle le félicite, encore. Et elle lui dit qu’elle est fière de lui. Et ça lui fait plaisir à entendre, Jun. Même si en soi, il n’a pas réellement besoin que quiconque soit fier de lui. Mais si ça lui importait, ce serait son avis à elle qui compterait. Pas celui de ses parents, pas celui de la population, pas celui de ces autres amis, le sien à elle.
Elle reprend la parole pour lui dire qu’elle espère qu’il soit fier d’elle lui aussi. Il réfléchit quelques secondes à ce qu’elle peut bien vouloir lui dire. De quoi pourrait-il être fier ? Mais finalement, il se dit que c’est pas important. Parce qu’à aucun moment il ne pourrait être déçu par elle. Genesis le rend fier, tout le temps, quoiqu’elle fasse. Juste parce qu’elle existe. Lorsque  la nouvelle tombe, Jun sourit. Il sait pas trop si c’est pour montrer aux caméras ou si c’est un vrai sourire. Mais il sait que Genesis elle, le sait. Parce que Gen le connaît mieux qu’il ne se connaît lui même, la plupart du temps. Il la regarde taper sur la table, et il finit par répondre. "Je suis fier de toi, ça oui. Vraiment. Et content que tu puisses entreprendre ça par toi même.." Il pense tout. Et tout ses mots comptent et ont un sens. Il est véritablement heureux pour elle. Il est véritablement fier d’elle. Et il est aussi heureux parce que ça signifie qu’ils vont pouvoir faire  cette aventure ensemble, et qu’il va pas se retrouver totalement seul, entouré de gens qui le pensent Ange de la Corée et qui attendent de lui ce qu’il fait de mieux : Des mensonges.

ootd ϟ Tu te dis souvent que tu as de la chance. De la chance d’avoir dans ta vie quelqu’un qui connaît tout de toi. Le bon comme le mauvais. Chacun des détails, les glorieux comme ce qui l’est beaucoup moins. Quelqu’un qui sera là. N’importe quand. Peu importe l’heure du jour ou de la nuit. Une personne qui ne se posera même pas la question du nombre de kilomètres à parcourir. Jun et ce quelqu’un. Cette personne pour qui tu ferais tout et n’importe quoi. Le frère que tu n’as jamais eu et que tu n’aurais d’ailleurs jamais pu rêver d’avoir. Voilà l’importance qu’il a pour toi. Alors évidemment tu prêtes une attention tout particulièrement à chacune des petites choses qui peuvent arriver dans sa vie. Tu es aux premières loges et tu le seras toujours. Tu te pli aux exigences du jeu qui rythme sa vie. Ce n’est pas toujours simple, ni même agréable, mais c’est comme ça. Tu le fais parce que c’est lui et que tu l’acceptes tel qu’il est, dans son entièreté. Tout comme toi il n’a pas une famille facile. Pire encore elle lui impose un mode de vie qui dans le fond ne lui convient pas. Quand tu y penses, tu as envie de faire de la vie de ces gens un enfer. De leur montrer qu’ils sont dans le faux, mais tu sais bien que tout ça est vain et qu’ils sont bien trop préoccupés par l’image qu’ils doivent préserver. Alors t’es tellement heureuse. Oui ça te rempli de joie que de constater aujourd’hui que d’une certaine manière, ton ami est en train de prendre son envol en participants à cette émission. Tu acquiesces à ses propos et tu ne peux t’empêcher d’ajouter telle la proud mama que tu es «  Tu ne peux pas l’être autant que moi je le suis de toi » et tu ajoutes dans la foulée «  j’ai tellement hâte de te voir évoluer dans cette nouvelle aventure ».  

ootd ϟ  Gen, c’est indescriptible. Il pourrait dire que s’il était hétéro, il serait amoureux d’elle, mais ce serait même pas vrai. Il pourrait pas l’aimer de cette façon là, Gen. Elle est trop importante, trop intéressante, trop parfaite pour qu’un gars comme Jun puisse ne serait-ce qu’imaginer pouvoir lui faire la cour un jour. D’ailleurs, il se demande Jun si un jour quelqu’un sera assez bien pour elle. Même s’il connaît déjà la réponse : Non. Il ne connaît personne qui serait assez bien pour elle. Il a parfois un peu l’impression d’être un daron surprotecteur qui veut pas donner la main de sa fille, mais c‘est  pas ça  non plus. Elle fait ce qu’elle veut, Gen. Juste  que  ça le ferait chier qu’elle attende pas de trouver quelqu’un qui lui corresponde parfaitement et qui la mérite.  Et les mecs qui la méritent ils doivent être rares, genre, quasi inexistants. Gen, elle a cette envie,  non, ce besoin d’indépendance que Jun comprend. Qu’il ressent  peut-être au fond de lui, sans réellement agir pour l’avoir. Parce qu’au final, Jun sait qu’il a de la chance. Puis surtout, Jun aime jouer. Il aime tellement ça. Et ses parents lui donnent l’occasion de jouer, tout le temps. De faire de sa vie un jeu. Avec un pays entier comme terrain de jeu. Chaque émission est un toboggan et chaque photo une balançoire. Chaque interview donné à un magasine et un bac à sable. Jun s’amuse, Jun joue. Et c’est probablement la seule chose qui l’empêche de totalement péter un câble et de tomber dans la dépression. Mais Gen, elle y arrive. Elle arrive à faire sa vie, loin de ses parents (plus ou moins) sans jouer. Elle arrive à le faire sans s’amuser de la situation, et Jun trouve ça dingue. Comme elle fait pour supporter  la pression sans craquer toutes les deux minutes ? Comment ? Lorsqu’elle finit par acquiescer et répondre, il a envie de lui répondre que c’est faux, qu’il est le plus fier des deux. Mais il sait que c’est peut-être pas le cas. Bien sûr qu’il est fier d’elle. Il l’est, très fier, extrêmement fier. Mais il sait aussi qu’elle aussi, l’est. Elle aussi a toujours été très fière de ses réussites, et a toujours été très attentive à ses échecs. Il saurait pas dire lequel des deux est le plus fier de l’autre parce qu’il pense sincèrement qu’ils sont aussi fiers de l’un que de l’autre. Elle dit qu’elle à hâte de le voir évoluer. Et il ne peut répondre qu’en disant que lui aussi. Il garde cette image d’enfant parfait. Il sourit pour les paparazzis et les oreilles indiscrètes. Mais dans ses yeux, dans son regard, y’a une excitation nouvelle, d’une nouvelle aventure. Il connaissait le toboggan, les balançoires et le bac à sable.
Il va découvrir le grand huit.
Sauf que, et ça aussi ça se voit dans ses yeux,
les grands huit, ça fait un peu peur.