내 이야기, STORYTIME | we condemn monsters and their nature because they're terrifyingly human. — r. meisel Ses parents travaillaient beaucoup et dès son plus jeune âge, Hanyeol était gardé par une nounou. C’était une jeune femme adorable, responsable et patiente avec les enfants – patiente avec la p’tite teigne qui lui tenait tête au goûter et l’écrasait sous les câlins le soir. Elle s’appelait Hyori et elle n’avait que vingt-deux ans quand la folie l’a frappé – Hanyeol avait trois ans lorsque sa vie a changé. Hyori est venue le chercher à la garderie comme tous les après-midis, mais elle n’est jamais arrivée à destination. Elle les a emmenés à la gare direction le sud du pays où elle avait déjà tout prévu, où elle mènerait sa nouvelle vie en une région isolée et campagnarde. « Où est maman ? » répétait-il tous les matins, perturbé les premiers jours. « Je suis là » répondait-elle et avec le temps, les souvenirs passés ont cédé leur place. Hanyeol a fini par oublier en grandissant, oublier qu’il avait deux parents fut un temps et qu’il vivait même à la capitale. Les souvenirs antérieurs à cinq ans ne sont qu’images découpées de moments aléatoires. Elle lui disait que son père était parti avant la naissance, mais qu’il lui ressemblait pour palier leurs traits différents. Elle lui répétait l’avoir eu trop jeune, mais qu’elle le chérissait plus que tout au monde – plus que son boulot et que sa propre famille, d’ailleurs, ce n’était qu’eux deux. Ils étaient heureux et Hanyeol s’épanouissait comme n’importe quel gosse du village, il aimait son écolé et la poignée d’amis qu’il s’y était fait. La vie était simple là-bas, solitaire parfois, mais il ne l’aurait échangé pour rien. Il se souvient encore des road-trips jusque Busan avec sa mère, des paysages magnifiques et indescriptibles qu’il tentait de peindre ensuite, de la plage et du ciel jonché d’étoiles, loin des éclairages ruraux. Il aimait cette vie, même si elle était basée sur un mensonge.

Il avait seize ans quand sa mère, de son véritable nom Lee Hana, s’est fait arrêter pour conduite en état d’ébriété. C’était stupide et sur le moment ils en ont ri : une nuit en garde à vue, une caution payée et tout serait réglé, mais elle avait dû oublier après tant d’années de répit. Elle s’est cachée les premières années, car son visage circulait dans tout le pays et celui du garçon aussi, puis le temps a passé et on les croyait hors du pays, voire même décédés. Ils auraient peut-être dû partir en effet et Hana n’aurait pas dû baisser sa garde. Quand Hanyeol est allé chercher sa mère au commissariat, on l’a assommé de questions et forcé à faire bagages : ils partaient pour Séoul le lendemain. Les révélations ont été pour lui un choc, mais pas dans le sens qu’on l’espérait car au fond et même s’il ne l’aurait pas deviné, il a toujours su que sa mère lui cachait quelque chose d’important. Il s’est mis en colère non pas contre la femme qui l’a kidnappé il y a des années, mais contre la police qui la traitait comme une criminelle dangereuse alors qu’elle était son monde. Ce jour-là, on a arraché sa mère à un gosse et on ne l’a même pas réalisé, obnubilé par l’idée de lui avoir rendu la vie qu’il méritait. On lui a dit qu’il serait heureux dans sa vraie famille, plus grande et chaleureuse, étrangère.

Il s’est adapté au fil du temps et aujourd’hui, il avoue apprécier ses proches même si les liens ne sont pas aussi fort qu’on le voudrait. Il a du mal à se confier et leur ouvrir entièrement son cœur, parce que la place est toujours prise par celle qui l’a élevé. On le sait et ça part en vrille lorsqu’on le lui reproche, surtout avec son frère. S’il adore sa sœur, il a beaucoup de mal à cerner son aîné et les choses ne sont jamais vraiment passés entre eux. Du moins, c’est l’idée que se fait Han et depuis des années il culpabilise de ne pas réussir à avancer. Il culpabilise d’être un si mauvais fils et un frère encore plus minable, mais son esprit ne le laisse jamais tranquille. Anxiété, crises d’angoisses et dépression – on lui tendait la main et lui s’isolait, puis il s’est mis à communiquer à travers le dessin. Il en laissait traîner dans la maison pour partager sa douleur et dès lors, on lui a laissé l’espace qu’il désirait. On le laissait respirer, mais on le protégeait aussi. Des étreintes chaleureuses entre les bras de sa sœur, des soirées films avec sa mère et même, un après-midi jeux vidéo avec son frère. On a cherché à le connaître et petit à petit il s’est ouvert, petit à petit il les acceptait. Ses démons sont toujours là, encore maintenant, mais il ne les met plus sur la faute des autres. C’est toujours venu de lui, toutes ces pensées négatives et oppressantes ne le quittent que lorsqu’il tient un crayon ou un pinceau ; que lorsqu’il s’évade ailleurs qu’ici, dans un monde où son cœur reflète ces couleurs vives plutôt que de s’effriter à force de déceptions. Vous ne le croiriez pas s’il disait être optimiste et pourtant, vous savez, il l’est plus que pas. Ses sourires et ses regards sont remplis d’espoir et une étincelle suffit à créer un brasier ; il suffit de savoir comment faire.